La pensée taoïste conçoit la divination comme l’art de lire les structures événementielles de l’univers, afin que l’Homme puisse contempler avec admiration les fluctuations et la pérennité du Tao, ainsi que percevoir par l’intuition, l’interdépendance entre toutes choses. Il lui faut reconnaître sa place dans l’univers, pas nécessairement éminente, l’essentiel étant qu’elle ait son rôle à jouer dans le dessein universel. Ces reconnaissances et ces acceptations permettent de percevoir les énergies présentes dans le milieu ambiant et d’œuvrer avec elles. L’Homme doit adopter une place de collaborateur de la nature et non de maître et comprendre que la connaissance réside en la faculté de coopération et non dans celle de manipulation.
Dans les arts mystiques taoïstes on trouve trois disciplines majeures :
Le Feng Shui qui reprend les rapports de l’homme avec la terre
Le Ba Zi ou astrologie chinoise qui analyse les rapports que l’homme a avec le ciel
Le Yi Jing qui lui permet d’être en accord avec sa destinée

Les premières tribus chinoises sont dirigées par des rois-chamanes qui connaissent les voies du vent (feng) et de l’eau (shui) et ont pouvoir sur les éléments. En effet, pour les habitants de l’ancienne Chine, le vent et l’eau sont des choses importantes car des vents légers présagent de bonnes récoltes et d’un bétail en bonne santé. Les sources et les fleuves préservent de la sécheresse, apportent la nourriture et garantissent la survie d’une population. En revanche, les vents violents détruisent les cultures, les eaux stagnantes engendrent la maladie et les eaux tumultueuses sont une piètre source de nourriture. On pensait alors que vent, eau, pluie, brouillard, soleil et nuages matérialisaient l’énergie du ciel et de la terre.
Peu à peu, les premiers empereurs de Chine vont acquérir la maîtrise des connaissances concernant la terre. Ils vont également observer le ciel et enregistrer la marche des astres et coder ce savoir en utilisant la méthode du calendrier. Puis (18ème – 12ème siècle av JC), un cycle de soixante jours, s’appliquant à l’année, est adopté. Il comporte six cycles, totalisant trois cent soixante jours. Le mouvement des constellations s’organise alors selon le système des Dix Troncs Célestes et des Douze Branches Terrestres. Chaque jour est désigné par la combinaison d’un tronc et d’une branche. Un peu plus tard, les Troncs Célestes vont être mis en correspondance avec les cinq éléments et les Douze Branches Terrestres avec les douze mois solaires. C’est à l’époque de Confucius et de Lao Tseu (environ 600 av JC) que douze symboles animaux seront attribués aux douze Branches Terrestres.
Les siècles suivants les fang shih « ceux qui sont spécialisés dans les techniques ésotériques » vont peu à peu devenir des personnages importants. Entre leurs mains, les arts divinatoires deviennent une branche de la connaissance. La théorie fondée sur le couple yin yang et les cinq éléments en constituent la base philosophique. Les trigrammes et les hexagrammes du Yi King en codifient la pratique. Ainsi théorie et pratique reposent sur un capital de connaissances approfondies faisant appel au calendrier, à la boussole, ainsi qu’à la documentation réunie sur les observations terrestres et célestes. Peu à peu, les connaissances des géomanciens intègrent des sciences comme l’astronomie, la géographie, la topographie, les mathématiques et l’architecture. Les arts divinatoires sont alors utilisés autant pour l’agriculture, que dans les stratégies militaires ou le choix des lieux de sépulture.

Sous la dynastie Ch’ing le karma individuel est introduit dans l’évaluation du feng shui propre à un lieu donné. Ce karma dépend de l’étoile sous laquelle est née une personne ainsi que de ses actes. En effet, les astres sous lesquels sont nés une personne interagissent avec la carte énergétique (pa k’ua) propre à un lieu donné, ce qui permet de décider si un emplacement convient ou non à cette personne. C’est aussi durant cette période que l’on commence à accorder de l’importance au choix du « bon » moment pour exécuter des travaux de terrassement destinés à un bâtiment, emménager dans une maison, effectuer des travaux dans une maison ou ériger une pierre tombale.
Cette trilogie Temps, Individu, Espace pose la continuelle interaction entre un individu donné et les forces spatio-temporelles qui l’entourent. La portée de l’impact d’une personne dépend continuellement du degré de correspondance et d’alignement entre : qui elle est ; l’endroit où elle opère (vie, travaille, aime,…) ; le moment où elle fait les choses. Lorsque l’alignement Ciel – Individu – Terre est en place, la voie s’ouvre.
Feng Shui
L’étude du feng shui commence par la compréhension de la présence du Tao dans la nature et l’humanité, processus par lequel l’espèce humaine peut en suivre la voie et vivre en harmonie avec l’univers. Le feng shui, comme les autres arts divinatoires, permet de vivre en fonction des hauts et des bas inhérents aux cycles de mutation. De même que l’on navigue sur un bateau en fonction du vent et du courant. Il enseigne comment équilibrer les éléments et harmoniser le couple yin yang, c’est-à-dire comment orienter sa voile ou barrer en fonction des éléments extérieurs.
Le feng shui est surtout et avant tout une tradition attaché au sol. La terre est vue comme une entité animée par l’énergie qui la parcourt et la baigne. A chaque type de configuration terrestre superficielle est associée une énergie particulière. La carte énergétique d’un lieu résulte du croisement des données relatives à sa date de construction (influence temporelle) et à son orientation (influence spatiale). Celle-ci se calcule, puis est interprétée en voyant sur le terrain la manière dont l’espace est aménagé. En plus de l’étude de l’environnement extérieur, le praticien va porter son attention sur l’ambiance intérieure c’est-à-dire le bâtiment lui même. Cet examen porte sur la forme de la construction, sa façade, son plan, les aménagements intérieurs, les jardins, les matériaux de construction…


La boussole géomantique (Lo-p’an) est employé pour obtenir l’orientation d’un lieu, information sur laquelle se fonde le « calcul » de la table géomantique. Elle comporte des cercles concentriques ainsi que vingt-quatre directions. Le flux des forces énergétiques, salutaires et nocives est révélé grâce aux Neufs Palais qui correspondent aux huit directions des trigrammes. Chaque palais étant désigné par un couple chiffre/couleur, appelé « astre », et associé à l’un des cinq éléments.
L’esprit s’étend dans les quatre directions, souffle tantôt par-ci, tantôt par-là. Il pénètre partout et imprègne tout. En haut, il caresse les cieux. En bas, il enlace la terre. Il transforme, anime et enrichit les dix mille choses.
Chuang-tzu
Ba Zi
Dans la tradition chinoise, l’énergie circule toute la journée dans le corps. Elle suit le trajet des méridiens principaux pour passer à travers les organes et les entrailles, le rachis et les membres. L’énergie circule selon un itinéraire prévu, mais aussi un rythme particulier. Elle est maximale dans un méridien pour une période de 2 heures. Elle est également plus présente dans une loge énergétique en fonction des saisons. Et il existe une zone de transition entre chaque saison où l’énergie se trouve au niveau de la loge rate-pancréas/estomac. En MTC ces cycles sont utilisés si un symptôme apparaît régulièrement, à heure fixe ou à une saison en particulier, pour rechercher un vide ou un excès dans une des loges énergétiques.

Un autre cycle comprend 60 années en rapport avec les 10 piliers célestes et les 12 branches terrestres. Une année revient tous les soixante ans. Le même mois revient tous les soixante mois (5 ans). Le même jour se représente tous les soixante jours (2 mois). En effet, en Chine, le temps est cyclique et peut donc être tenu pour une force identifiable. La longue tradition d’observation (depuis 2637 av J.-C.) a permis d’analyser, de modéliser, de déduire et de vérifier l’intérêt pratique du système. Un tableau permet de déterminer l’énergie de l’année ainsi que l’interaction de cette énergie temporelle avec une personne. A ce stade, la MTC se rapproche de l’astrologie et prévoit les maladies par rapport à l’influence des astres et des énergies telluriques sur l’individu. On comprend alors que le médecin traditionnel chinois de premier ordre soigne avant que la maladie n’apparaisse car il peut la prédire. Il va soigner à une date bien précise pour que son action thérapeutique soit maximale.
Les techniques chinoises dites du Ba Zi (basée sur le calendrier solaire) ou de Zi Wei Dou Shu (basée sur le calendrier lunaire) ont pour objectif le décodage de la trame énergétique de la personne à partir de sa date de naissance. La carte énergétique est la combinaison de l’année, du mois, du jour et de l’heure de naissance traduits en éléments chinois. Elle permet la mise à plat des forces en présence, des atouts et des points de fragilité. Pratiquées en conscience, avec compétence et bienveillance, ces techniques éclairent le chemin et mettent la personne face à la responsabilité d’exercice de ses qualités. Le fait de nommer les caractéristiques énergétiques d’une personne peut lui apporter une meilleure cohérence entre ses aspirations et ses actes, en lui permettant d’explorer, d’autoriser ou de libérer ses capacités.
Yi Jing
Les plus anciennes traces du yin et du yang viennent du Yi Jing qui traite des changements permanents du yin et du yang dans la nature. Le yin, le yang et le mouvement entre le yin et le yang donnent naissance aux huit trigrammes puis aux soixante-quatre hexagrammes, base du système ancestral chinois de divination.
Le Yi Jing permet de poser une question à l’univers et d’obtenir une réponse claire et pertinente, éclairant à la fois la situation présente et la marche à suivre pour avancer ou pas. Cette réponse est délivrée sous la forme de deux trigrammes formés part des combinaisons de traits yin et yang (trait vide au milieu : force yin & trait plein : force yang).

Une autre technique, dite de la Fleur de Prunier, permet de décoder des messages envoyés par l’univers, alors que l’on a rien demandé. Y sont utilisés les hexagrammes et la mesure précise du moment où l’évènement porteur du message est apparu. L’évènement doit être suffisamment remarquable, hors de l’ordinaire, pour être retenu comme signifiant.
L’art chinois du décodage des forces spatiales et temporelles comporte parmi ses outils un certain nombre de figures. Par exemple, les représentations des Cieux Primitifs et Ultérieurs. Elles représentent les pierres d’angle d’une pensée originale, faisant se correspondre l’infinie variété du monde et l’abstraction la plus pure.


Le diagramme du Ciel Antérieur comporte un principe clair de correspondance entre les trigrammes opposés. Il représente une image possible de la perfection, il est symétrique et harmonieux. Le diagramme du Ciel Postérieur représente la manière dont les énergies sont posées sur cette terre, après la création du monde. Il indique à la fois la complexité de tout ce qui nous entoure et la qualité des énergies qui viennent à nous depuis chaque direction. C’est une représentation du « monde manifesté », c’est-à-dire celui dans lequel nous vivons et qui nous est perceptibles par nos sens. C’est la vie telle qu’elle est, faite de haut et de bas, de vides et de pleins, de variations perpétuelles.
La seule chose qui ne changera jamais, c’est que tout est toujours en train de changer
Yi Jing
Dans la tradition chinoise, l’objectif premier est le renforcement de l’énergie vitale. Cette vitalité peut-être dilapidée ou investie sagement. Les aptitudes, les compétences et les réalisations sont considérées comme faisant partie d’une équation plus large où interviennent également les effets du temps et de l’espace. En effet, le temps et l’espace ne sont pas tenus pour des concepts abstraits ou des facteurs surpuissants se substituant à la volonté personnelle. Ils sont vus comme des compagnons de tous les jours avec lesquels il convient de composer. Ce sont des acteurs actifs de notre vie même si nous ne les voyons pas comme tels. Chacun a la responsabilité de leur prêter attention, de s’allier leurs qualités ou de se protéger de leurs défauts.
La compréhension de la perspective chinoise traditionnelle, économe de force et centrée sur la préservation de l’énergie vitale, donne une palette de connaissances qui élargit l’éventail des réponses possibles en cas de difficulté. Elle augmente la visibilité et permet de saisir des opportunités qui n’auraient pas été vu autrement.
La voie du Feng-Shui, MP Dillenseger
Leçons approfondies de Feng Shui, Eva Wong
Oser s’accomplir, MP Dillenseger
Yi King – le livre des transformations, Richard WILHEM, Etienne PERROT
Yi Jing – le livre des changements, Cyrille J.-D. Javary, Pierre Faure
La médiation sinokinétique, Wilfrid Delamer
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